Les observateurs et analystes lient le succès de la visite du ministre des Affaires étrangères français, Jean-Noël Barrot, en Algérie et la réduction des tensions entre les deux pays, a la réponse de Paris aux demandes algériennes et de la capacité du président Emmanuel Macron à dépasser la question algérienne en tant que point de conflit entre les partis de droite et de gauche en France.
Le Dr Rachid Allouche, spécialiste des affaires stratégiques, a déclaré que « ce que l'on attend de la visite du ministre des Affaires étrangères français en Algérie, c’est de rechercher des voies pratiques pour restaurer les relations algéro-françaises à travers le dialogue, afin de calmer les tensions diplomatiques et de discuter de tous les dossiers qui ont contribué à l’escalade de la crise entre les deux pays pendant plus de huit mois. »
Il a ajouté que cela se ferait par la recherche de détails pratiques pour relancer la coopération dans des domaines tels que la sécurité, l'immigration, la mémoire et l'économie, ainsi qu’en discutant des questions problématiques dans la région du Maghreb, en se basant sur la légitimité internationale et le droit international dans son cadre mondial, comme le montre la feuille de route exprimée dans la déclaration conjointe entre le président Tebboune et son homologue français lors de leur conversation téléphonique du 31 mars 2025.
« Par ces voies, qui comportent des conditions préalables mises en avant par l’Algérie, la possibilité de progresser ou de faire une percée dans la résolution de la crise dépendra de la réponse de la France aux demandes algériennes. » a-t-il poursuivi.
Il a insisté sur le fait que la flexibilité de Paris dans le traitement de tous les dossiers et la discussion en détail étaient la seule voie pour relancer la coopération bilatérale exclusivement à travers des canaux diplomatiques. C’est l’objectif principal attendu de la visite de Barrot en Algérie, qui est perçue comme le début d'une réduction de la crise diplomatique et d’un contrôle de son intensification.
De son côté, le professeur en droit international et sciences politiques, Dr Khaled Khelif, a déclaré que la visite reflète ce que les présidents algérien et français ont exprimé il y a quelques jours lors de leur conversation téléphonique, qui a mis fin à l'escalade et aux déclarations agressives, en particulier de la part des membres du gouvernement français.
Il a précisé que la visite contribuera à faire fondre la glace entre les deux pays, mais que tout progrès dans la résolution des différends complexes dépendra de la réponse de la partie française à plusieurs dossiers jugés cruciaux par l'Algérie, notamment la question de la mémoire, la coopération judiciaire, la circulation des personnes entre les deux pays et la prise en compte des intérêts communs dans le domaine économique, sans oublier le rôle que jouent les deux pays au niveau régional et international.
Le journaliste et analyste en affaires politiques et relations internationales, Kadour Ben Attia, estime que cette visite s’inscrit dans les efforts de dégel et de réanimation de relations qui sont restées mortes pendant des semaines entre l’Algérie et la France. Il a indiqué que la possibilité de redynamiser les relations existe, mais la normalisation reste suspendue à la volonté politique des deux parties et à la capacité du président français, Emmanuel Macron, à dépasser la question algérienne comme un point de conflit interne dans la scène politique française, notamment entre les partis de droite et de gauche.
Ben Attia a ajouté que la visite vise à tester les intentions et à déterminer les opportunités de négociation, et peut-être aussi à s'entendre sur quelques questions mineures ou secondaires pour rétablir la confiance entre les deux parties et passer ensuite aux dossiers plus complexes et plus imbriqués, tant bilatéraux que multilatéraux.
Il a rappelé que les relations algéro-françaises ont traversé, depuis 2019, des périodes difficiles, s’effondrant à plusieurs reprises malgré des tentatives de rétablir la situation, y compris la feuille de route de 2022, qui a été entravée par la crise estivale (la reconnaissance française de la prétendue souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental) et par la crise automnale liée à l’affaire de Sansal et ses conséquences.
Ben Attia a déclaréque « le fait de s’asseoir à la table des négociations et de s’accorder sur cette voie constitue une avancée dans la situation actuelle. Il faut donc attendre les résultats de cette visite, surtout qu’elle vise à organiser une séance de travail qui semble ardue au siège du ministère des Affaires étrangères, suivie d’une rencontre à l’ambassade de France, se concluant par une confrontation "froide" ou "chaude" avec la presse nationale. »
Il estime que les présidents Tebboune et Macron, lors de leur dernier appel téléphonique, ont tracé une nouvelle feuille de route qui pourrait ramener les deux pays à la situation qu’ils occupaient avant le mois de juillet dernier.
Selon lui, cette feuille de route comprend tout d'abord la reprise immédiate de la coordination en matière de sécurité, qui est le premier sujet mis sur la table des négociations pour servir de base pour l'avenir.
Le deuxième point est la crise des visas diplomatiques, le troisième concerne la coopération judiciaire, et le quatrième est la reprise des discussions sur la mémoire.
Ben Attia a souligné que le succès des négociations sur ces quatre points pourrait permettre de passer aux questions plus complexes, telles que les archives, les compensations pour les essais nucléaires et les armes interdites, les disparus (le dossier historique), la mobilité entre les deux pays (les visas), l'immigration, la coopération consulaire, la coordination en matière de sécurité en Méditerranée occidentale, au Sahel et en Afrique, ainsi que la coopération économique et technologique, y compris la renégociation entre l’Algérie et ses voisins européens, sans oublier les questions liées à l’énergie, la diaspora algérienne à l’étranger et les travailleurs algériens hautement qualifiés, en particulier les médecins.
Le conférencier relie le retour des mécanismes de coopération entre les deux parties à la restauration d’un climat de confiance et à la réalisation d’un succès dans l’un des dossiers prioritaires. Ces mécanismes comprennent le comité gouvernemental de haut niveau, le comité de dialogue politique qui se réunit chaque année mais qui a été absent cette année en raison de la crise, ainsi que le comité de sécurité et celui de la mémoire, entre autres.
Enfin, il ajoute que l’accord potentiel entre les deux parties dépendra de l’éloignement de la rhétorique unilatérale et condescendante, ainsi que de l’abandon définitif de la logique de force dans la gestion de tout dossier. Il espère que cela aboutira à une solution définitive à la question des personnes recherchées et aux fonds algériens détournés, en contrant les actions menées contre l’Algérie et ses intérêts vitaux ici et là.
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