L'extrême droite s'empare du discours officiel en France

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Les déclarations du président français Emmanuel Macron, suivies de celles de ses ministres des Affaires étrangères et de l'Intérieur envers l'Algérie, ainsi que les éléments et termes du communiqué du ministère algérien des Affaires étrangères, publié dimanche dernier, qui a analysé et approfondi la crise avec Paris, distinguant entre le discours politique de l'extrême droite, les exigences du discours officiel et les aspects juridiques dans l'affaire du refus de l'Algérie d'accueillir un citoyen poursuivi en justice en France, montrent que le courant politique radical a pris en otage le discours officiel et le pouvoir, et est en train de s'emparer de l'État.
En examinant les déclarations des ministres français des Affaires étrangères et de l'Intérieur, il apparaît que les procédures juridiques régissant les relations entre les États ont été diluées dans un discours partisan. Le communiqué du ministère algérien des Affaires étrangères a ainsi signalé, dans l'affaire du rapatriement du citoyen, que cette question avait été politisée et retirée de son contexte juridique, en présentant le refus de l'Algérie d'accueillir un citoyen franco-algérien poursuivi en justice à Montpellier comme une tentative d'humilier la France. Pourtant, c'est le contraire qui s'est produit : les procédures de rapatriement ont privé l'intéressé d'assister à une audience prévue le 14 février prochain, et par conséquent de son droit à un procès équitable. Sur le plan juridique, cela constitue une atteinte du pouvoir exécutif aux prérogatives du pouvoir judiciaire, dans un pays qui tente de se présenter comme respectueux du principe de séparation des pouvoirs.
Parmi les éléments qui renforcent l'hypothèse de la prise en otage du discours officiel français, le communiqué du ministère algérien des Affaires étrangères mentionne « l'implication de l'extrême droite, connue pour son discours de haine et son esprit revanchard, à travers ses partisans déclarés au sein du gouvernement français, dans une campagne de désinformation et de diffamation contre l'Algérie », et que l'extrême droite et ses représentants « cherchent à imposer sur les relations algéro-françaises leurs rancunes pleines de menaces et d'intimidations, des rancunes qu'ils expriment ouvertement et sans la moindre retenue ou contrainte ».
Ces éléments rendent évident que le discours officiel en France connaît des transformations radicales, au point de dévier, par rapport à la nature et à la qualité du discours sous les anciens présidents, quelles que soient leurs affiliations et leurs convictions politiques, en particulier sous l’ancien président Jacques Chirac, qui a représenté l'âge d'or dans l'élaboration d'un discours d'État éloigné des caprices partisans ou idéologiques.
Sur le plan juridique, avant d'aborder la question d'un point de vue algérien, des journalistes en France ont évoqué la décision de rapatriement du citoyen avec neutralité et objectivité, en soulignant que cette mesure n'aurait pas dû être prise tant que l'intéressé était soumis à des échéances légales et qu'une audience était prévue le 14 février prochain. Son éloignement du territoire français pourrait l'empêcher de se défendre devant la justice française et de bénéficier d'un procès équitable.
La journaliste du magazine Regards, Catherine Tricot, a appelé dans une interview avec la chaîne France Info les autorités de son pays à rechercher l'apaisement, non seulement avec l'Algérie, mais également avec de nombreux pays africains avec lesquels les relations se sont nettement détériorées ces derniers temps. Elle a également souligné la nécessité de revoir les approches dans les relations avec son environnement méditerranéen et africain.
D'un point de vue algérien, vider cette affaire de sa dimension juridique, régie par une convention datant de 1974, comme l'a souligné le communiqué du ministère algérien des Affaires étrangères, et la politiser, indique deux hypothèses : la première concerne l'incompétence des responsables du ministère de l'Intérieur, et la seconde, plus probable, est la domination de la pensée politique extrémiste sur les mécanismes de gestion des affaires gouvernementales et son intégration dans des plans visant à diffamer l'Algérie et à la présenter comme un État voyou. Cela constitue une autre preuve que nous sommes face à une prise en otage du discours officiel et du pouvoir.