5ème réunion de la commission mixte algéro-française sur l'histoire

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La commission mixte algéro-française sur l'histoire et la mémoire se réunit aujourd'hui à Alger pour la cinquième fois, rassemblant des historiens des deux pays. Les membres de la commission discuteront de questions et de dossiers historiques cruciaux en vue de la visite du président Abdelmadjid Tebboune en France à l'automne prochain. Parmi les sujets abordés figurent la reconnaissance des massacres perpétrés pendant la période coloniale en Algérie, la restitution des épées, des traités et des effets personnels de l'émir Abdelkader, ainsi que des documents d'archives originaux relatifs aux révoltes populaires.
Le président de la commission française, l'historien Benjamin Stora, est arrivé ce lundi à Alger accompagné du directeur des Archives nationales françaises et du directeur de la Bibliothèque nationale de France pour participer à cette cinquième réunion bilatérale, qui se tiendra jusqu'au 24 du mois en cours, selon des sources officielles.
Les discussions porteront sur le travail historique relatif à la période de l'invasion militaire française et ses effets sur la structure de la société algérienne, y compris les crimes de pillage, la confiscation des terres au profit des Européens et les déplacements forcés. Benjamin Stora a souligné la nécessité de travailler sur les motivations et les antécédents de la campagne coloniale, les différentes phases de la présence française en Algérie, en identifiant méthodiquement les phases clés, les personnalités historiques et les zones de massacres avec une approche scientifique rigoureuse.
Benjamin Stora a mentionné qu'une partie importante des discussions porterait sur l'inventaire des archives en possession de la France concernant les Algériens. Un effort bilatéral sera également fait pour évaluer ce qui a été réalisé du côté français, notamment la numérisation de 2 millions de pages d'archives de cette période.
Les discussions incluront, également, la restitution des documents, en particulier ceux liés à l'émir Abdelkader.
Stora a déclaré que la visite du président Tebboune en France représente une "opportunité pour reconnaître le passé colonial français en Algérie et pour examiner de manière scientifique et méthodique les massacres commis par l'armée d'occupation contre le peuple algérien au début de l'invasion."
Stora considère que la visite de Tebboune en France est d'une importance capitale pour les deux parties, espérant qu'elle renforcera la réconciliation mémorielle entre les deux pays. Malgré les complications et les divergences de vues entre chercheurs et politiciens, Stora appelle à se tourner vers l'avenir dans le cadre d'un partenariat entre la France et l'Afrique en général. Il a souligné que le programme de travail est "ambitieux et riche," s'inscrivant dans une approche visant à réconcilier les mémoires.
Stora a, également, abordé la question de la restitution des archives de la période coloniale, reconnaissant l'ampleur de la tâche étant donné la quantité considérable de documents en possession de la France. Il a appelé à se concentrer initialement sur le XIXe siècle pour mieux comprendre les événements de cette période.
Parmi les initiatives proposées en préparation de la visite de Tebboune, Stora a mentionné la restitution des effets personnels de l'émir Abdelkader, y compris ses épées, ses vêtements, son burnous, ses ouvrages religieux, ses recueils de poèmes et son Coran personnel. Stora a exprimé l'espoir que ces objets soient restitués lors de la visite de Tebboune, soulignant que cette proposition reflète sa position académique et culturelle personnelle.
En ce qui concerne les archives de la guerre de libération et les documents relatifs au Front de Libération Nationale (FLN), Stora a noté que la France ne détient pas tous les documents sur le FLN. Il a invité la partie algérienne à poser des questions spécifiques sur des événements précis de cette période, comme le nombre de disparus algériens et les circonstances de la mort de certaines figures révolutionnaires telles que Mostefa Ben Boulaïd et Larbi Ben M'hidi. Stora a également évoqué l'importance de reconnaître des assassinats tels que ceux d’Ali Boumendjel et Maurice Audin.
Benjamin Stora a déclaré dans ce cadre : "Dans mon rapport il y a quatre ans, j'avais souligné la nécessité de reconnaître l'assassinat de Ali Boumendjel et de Maurice Audin, et j'avais demandé des actions concrètes et non des généralités."
"Nous préférons travailler sur des recherches historiques concernant des événements précis et sortir des généralités en nous concentrant sur des dossiers spécifiques comme celui du 17 octobre", a-t-il poursuivi.
L'historien français ajoute que "le travail doit porter sur des événements, des personnages et des documents spécifiques, et il faut œuvrer à leur restitution par étapes. C'est une position bien connue de ma part," conclut-il.