L'entretien du président Abdelmadjid Tebboune avec le journal français « l’opinion », publié dans l'édition de dimanche, a révélé pour la première fois des détails sur des événements passés et des questions qui sont annoncées pour la première fois.
Le président a déclaré qu'il était à l'origine de l'initiative de créer la "Commission pour la mémoire partagée" avec la France, après la visite du président français Emmanuel Macron en Algérie en août 2022. Il a également donné pour la première fois son avis sur son travail, en déclarant "J'ai exprimé ma tristesse que nous ne plongions pas assez profondément dans le cœur des choses".
La première fois que les présidents de l'Algérie et de la France ont abordé le projet de reconnaissance par Paris de "la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental" a eu lieu le 13 juin dernier, lors de leur rencontre dans le cadre du sommet du G7 à Bari, en Italie. Il est connu que la France a informé l'Algérie de cette décision fin juillet dernier.
Le 25 juillet 2024, le ministère algérien des Affaires étrangères a publié un communiqué dans lequel il affirmait que Paris avait informé de son intention de soutenir le plan d'autonomie marocain, ce qu'il a fermement dénoncé. Depuis lors, les relations avec l'ancienne puissance coloniale sont entrées dans un sombre tunnel.
Dans cet entretien, Tebboune a annoncé que l'Algérie accepterait de recevoir 306 migrants algériens résidant aux États-Unis, que Donald Trump avait décidé d'expulser. Il a également révélé, concernant les migrants algériens en situation irrégulière, l'émission de 1800 permis consulaires l'année dernière, permettant aux autorités françaises d'expulser les "harragas" (immigrants clandestins).
En 2021, une crise a éclaté entre l'Algérie et la France concernant les permis consulaires. À ce sujet, Tebboune a déclaré que le ministre français de l'Intérieur, Gérald Darmanin, "voulait imposer sa méthode d'expulsion des Algériens", annonçant pour la première fois que les deux parties "avaient trouvé la bonne approche" pour résoudre cette crise lors de la visite de Darmanin en Algérie fin 2022. Cependant, le problème demeure.
Le président a également suggéré dans cet entretien que l'Algérie accepterait des demandes d'expulsion de la France si Paris répondait positivement aux demandes d'extradition de fugitifs recherchés par l'Algérie, comme le font l'Espagne, l'Italie et l'Allemagne.
Il a révélé pour la première fois, dans ses réponses aux questions, que l'Algérie détient des informations selon lesquelles certains fugitifs recherchés par ses autorités résident en France et sont utilisés par les services de sécurité français comme informateurs.
Tebboune a également évoqué le cas de l'écrivain emprisonné, Boualem Sansal, qui, avant son voyage en Algérie en novembre 2024, était allé dîner chez Xavier Driencourt, ancien ambassadeur d'Algérie, et qu'il était prévu qu'il rencontre le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, à son retour en France.
On peut comprendre des propos du président que l'ancien diplomate français et son collègue, le ministre Retailleau, connus pour leur hostilité envers l'Algérie, aient été derrière les déclarations de Sansal concernant "le droit du Maroc sur certaines parties de l'ouest de l'Algérie", qui ont conduit à sa mise en examen.
Tebboune a ajouté que Retailleau cherche à affaiblir le doyen de la mosquée de Paris, Chams-eddine Hafiz, en vue de l’écarter, en menant une enquête sur ses biens en France, "en complicité avec des pays arabes".
Concernant les relations bilatérales tendues, le président a confirmé une information publiée par « Le Figaro », selon laquelle le directeur des services de renseignement extérieurs, Nicolas Lerner, s'était rendu en Algérie le 13 janvier dernier. Il a exprimé sa confiance en lui en affirmant "nous lui faisons confiance depuis qu'il était directeur des services de renseignement intérieur ".
Tebboune a, sur ce sujet, révélé que la coopération avec les services de renseignement intérieur français est complètement arrêtée "en raison de la supervision de ces services par le ministre Retailleau". En revanche, la coopération avec les services de renseignement extérieurs (relevant du ministère des Armées) continue.
En ce qui concerne le nettoyage des sites où la France a mené ses essais nucléaires, le président a expliqué que son pays pourrait bénéficier de l'expertise des Américains, des Indonésiens et des Chinois dans ce domaine, mais qu'il préférait que cela soit fait avec les Français en raison de leur connaissance des endroits où les matières toxiques ont été enterrées.
Il a également révélé qu'il avait envoyé un émissaire au président syrien Bachar el-Assad avant sa chute, pour lui proposer des négociations avec l'opposition armée sous l'égide de l'ONU. Mais selon lui, cette tentative a échoué.
Avant sa visite à Moscou en juin 2023, le président Macron avait demandé à Tebboune de discuter avec le président russe Vladimir Poutine d'une initiative pour la paix en Ukraine. Tebboune a précisé que Poutine lui avait donné "le feu vert" et qu'il était prêt à négocier cette initiative, "mais le président ukrainien n'y a pas répondu", sans donner de détails sur le contenu du plan.
Pour la première fois, Tebboune a annoncé qu'il avait "informé les amis russes de notre refus de la présence de groupes Wagner à nos frontières", ce qui signifie que les milices russes alliées aux militaires réguliers du Mali et du Niger sont effectivement devenues une source de préoccupation pour l'Algérie.
En ce qui concerne la situation au Mali, le président a révélé que le chef religieux malien, Mahmoud Dicko, rejeté par les autorités militaires, est actuellement membre du conseil scientifique de la Grande mosquée d'Alger et réside dans le pays.
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